Le pacte d'associés : un document indispensable pour sécuriser vos relations d'associés

Nicolas Lévêque

3/23/20256 min read

Lors d’une association au sein d’une société, la conclusion d’un pacte d’associés entre les associés est fondamentale.

En pratique, le pacte d’associés aura principalement 3 objectifs : (i) Prévoir les règles applicables à votre société en matière de gouvernance, (ii) prévoir les règles applicables en matière de transferts de titres et (iii) sécuriser votre activité.

De ce fait, il est vivement recommandé de conclure le pacte dès la constitution de votre société. En effet, même si au début du projet les relations sont bonnes entre les associés, des tensions peuvent rapidement survenir qui peuvent aboutir à devoir gérer des situations de blocage ou pire, mettre en péril votre projet (mésentente, désalignement d’intérêts, etc.). Et ces précisément dans ces situations que le pacte d'associés vous permettra de trouver une solution de sortie de crise et ainsi maintenir la valeur que vous aurez d’ores et déjà créée avant la survenance des difficultés.

Dans cet article, Askair avocat vous propose de revenir sur les principales clauses du pacte d'associés.

Les clauses encadrant la gouvernance

En matière de gouvernance, le pacte d'associés aura généralement vocation à compléter les règles statutaires en fonction de la forme sociale de votre société qui pourra être plus ou moins rigide. Dans les formes sociales contractuelles telles que la société par actions simplifiée, le pacte d'associés reprendra votre gouvernance de manière plus précise.

A la constitution de votre société, et en particulier lorsque votre projet n'est pas totalement défini en termes de positionnement sur votre marché ou de développement de produit, il est recommandé de ne pas complexifier les règles de gouvernance afin de conserver une certaine agilité dans la prise de décision. Par exemple, on retrouve dans beaucoup de startup une gouvernance simple avec un Président (qui sera généralement l’un des fondateurs majoritaires) et éventuellement un Directeur Général qui pourra être un cofondateur. La présence d’un organe collégial “décisionnel” est beaucoup plus rare à ce stade du moins tant qu’il n’y a pas d’investisseur financier. En revanche, on peut trouver, dans certains cas, des organes collégiaux de type consultatif composés d’advisors notamment.

En tout état de cause, la complexité des règles de gouvernance de votre société dépendra de plusieurs facteurs tels que sa maturité, la répartition du pouvoir entre blocs d'associés ou bien le secteur d'activité. A noter, par ailleurs, qu'en présence d'investisseurs financiers, il sera courant de prévoir dans le pacte d'associés des clauses spécifiques d'information (reporting financier) ou d'audit par exemple.

Les clauses encadrant le transfert des titres

En matière de transfert de titres, les clauses d’un pacte d’associés vont avoir pour principaux objectifs de (i) contrôler la composition de l’actionnariat afin d’éviter qu’un tiers non souhaité entre au capital de manière inopinée, (ii) gérer les problématiques de liquidité des actions et (iii) traiter le départ anticipé de l'un des fondateurs clés.

Ainsi, les principales clauses en matière de transfert de titres que vous pourrez retrouver classiquement dans un pacte d’associés sont les suivantes, étant entendu, qu’il existe une multitude de clauses qui pourra également être intégrée en fonction des particularités de votre projet :

  • ‍Inaliénabilité (ou « lock-up ») : clause permettant de stabiliser l’actionnariat de la société en empêchant un ou plusieurs associés (en général, les fondateurs clés) de céder leurs titres pendant une période déterminée. En phase early stage, il peut être judicieux de prévoir une clause de respiration afin que le fondateur majoritaire puisse intéresser librement un ou plusieurs tiers qui auraient des compétences intéressantes pour compléter l’équipe dédiée au projet.

  • Droit de préemption : Clause permettant à son ou ses bénéficiaires, en cas de transfert de titres de la startup, d’acquérir prioritairement les titres dont le transfert est envisagé, aux mêmes conditions, notamment de prix que celles proposées à l’acquéreur initial. Cette clause peut être complexifiée en prévoyant des rangs de priorité entre investisseurs financiers et fondateurs par exemple afin de maintenir l'équilibre capitalistique entre les blocs d'actionnaires.

  • Agrément : clause permettant de soumettre à l’accord préalable d’un organe spécifique (Président, organe social ou collectivité des associés) les cessions de titres de la Société. L’objectif de cette clause est de verrouiller l’actionnariat de la société en contrôlant l’entrée de nouveaux associés.

  • Droit de sortie conjointe : clause qui permet aux associés minoritaires, en présence d’un événement déclencheur (par exemple, le transfert de plus de la moitié du capital de la société, le changement de contrôle, l’entrée au capital d’un industriel non approuvé, etc.), de céder tout ou partie de leurs titres.

  • Obligation de sortie forcée : L’obligation de sortie est une clause permettant aux fondateurs majoritaires d’imposer aux autres associés (généralement les associés minoritaires) de céder la totalité de leur participation en présence d’une offre portant sur la totalité des titres et des droits de vote de la société. L'objectif de cette clause est d'éviter qu'un associé minoritaire récalcitrant bloque une cession à 100% au profit d'un tiers.

  • Promesse de vente (good/bad leavers) : Engagement des associés clés ayant un rôle opérationnel afin de céder leurs titres dans le cas où ils cesseraient leurs fonctions au sein de la société. Cette clause n’est pas toujours prévue dans les pactes de startup early stage, mais sera régulièrement demandée dans le cas où un investisseur financier entre au capital. La particularité de la clause est que le prix de rachat des titres varie en fonction du motif du départ (good leavers ou bad leavers). A noter toutefois que cette clause a le mérite de protéger la société en évitant qu'un associé reste au capital sans avoir un rôle actif dans la création de valeur.

  • Rendez-vous / liquidité : Clause qui instaure un processus pour organiser la vente de la société à l'issue d'un horizon d'investissement prédéfini. Cette clause est fondamentale et sera généralement intégrée dans le pacte d'associés en présence d'investisseurs financiers afin de leur permettre d'obtenir une liquidité sur leurs titres.

  • Anti-dilution : Cette clause a pour objectif de permettre aux associés bénéficiaires de conserver leur pourcentage de détention dans le capital en cas d’opération capitalistique dilutive (telle qu’une augmentation de capital par exemple).

Les clauses sécurisant l'activité

La sécurisation du projet et de l'activité est un point clé du pacte d’associés. L’objectif ici est de prémunir la société contre les trois principaux risques juridiques pouvant résulter d'une dégradation des relations entre associés : la concurrence déloyale, le désinvestissement d’un associé clé, et, lorsque la société développe des solutions informatiques, le transfert de la propriété intellectuelle sur l’application.

À cette fin, les principales clauses sont :

  • Clause de non-concurrence : Cette clause a pour objectif d’éviter qu’un associé développe une activité qui serait de nature à faire concurrence à la société tant qu’il est associé, dirigeant ou après pendant une période déterminée.

  • Non-sollicitation : Cette clause a pour objectif d’interdire à un ou plusieurs associés de solliciter ou débaucher les salariés de la société, et/ou à ne pas solliciter ou prospecter ses clients pour leur proposer des produits ou services similaires à ceux de la société.

  • Transfert des droits de propriété intellectuelle : Au titre de cette clause, tous les droits de propriété intellectuelle (marques, brevets, noms de domaine, droit d’auteur, etc.) développés par les associés dans le cadre de l’activité de la société devront être transférés à cette dernière. Cette clause est capitale dans le cas où la société développe une solution informatique (application, logiciel ou autre). En effet, il faut savoir qu’en l’absence de clause, les droits d’auteurs du développeur ne pas automatiquement transférés à la société, y compris lorsque c’est un associé ou un mandataire social qui est à l’origine du code source (la seule exception est le cas où le développeur est salarié de la startup). Les règles en la matière sont subtiles et piégeuses, il est donc recommandé d’être extrêmement vigilant en la matière.

  • Engagements professionnels des fondateurs : le pacte d’associés peut préciser les engagements de chacun des associés fondateurs afin de définir les tâches à réaliser par chacun d’entre eux, le nombre d’heures à consacrer au projet ainsi que la sanction en cas de non-respect desdits engagements.

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